la filadière sur la Gironde

Avec ses 60 appellations en AOC et plus de 100.000 hectares de vignes, la région de la Gironde, où se situe Bordeaux, constitue le plus grand territoire viticole en France. L’estuaire de la Gironde est le confluent de deux fleuves - la Garonne et la Dordogne. Le premier fleuve prend sa source au Sud à plus de 600 kilomètres dans les Pyrénées espagnoles et le second en Auvergne à l’Est dans les montagnes du Massif Central à près de 500 kilomètres. La Gironde marie ces deux masses d’eau sur près de 100 kilomètres avant de rejoindre l'océan Atlantique et constituer la limite Nord de la Côte d'Argent, la plus longue plage d'Europe. Ce climat maritime assure des hivers plus modérés et des étés variables aux zones viticoles de cette région. Il affecte aussi le terroir et donc les millésimes. Une grande partie de ces terres exploitées le long de l’écosystème fluvio-estuarien est classée Grand cru (dans le cadre du classement de 1855). Les appellations s'étendent des deux côtés de la Garonne et de la Dordogne et dans l’Entre-Deux-Mers. En termes viticoles, la «Rive Gauche» et la «Rive Droite» peuvent prêter à confusion car elles ne correspondent pas au même fleuve. La Rive Gauche, se réfère à la rive gauche de la Garonne (Médoc, Pauillac); la Rive Droite (Pomerol, Saint-Emilion), se réfère à la rive droite de la Dordogne alors que l'Entre-Deux-Mers, berceau de l'explorateur du monde sous-marin et défenseur de l'environnement, Jacques-Yves Cousteau, se situe entre les deux fleuves.

L’auteur, et Simon, pêcheur professionnel à la retraite et viticulteur, font une sortie sur la Gironde. Cet estuaire viticole est aussi un axe de migration pour les oiseaux et les poissons. Tout en naviguant et en pêchant, l’écologue et le pêcheur discutent de l’évolution du système fluvio-estuarien de la Gironde en terme de qualité d’eau, de richesse faunistique. Les dégradations subies et les pressions existantes sont mises en perspectives face à des actions politiques de préservation du milieu et d’un cadre de vie.

Quand Simon m’invite dans sa filadière, un bateau de pêche en bois, traditionnel, ici, dans l’estuaire de la Gironde, j’aime l’écouter me raconter ce milieu sauvage qu’il semble si bien connaître.

Le soleil est déjà haut. Attentive aux propos de cet ancien pêcheur professionnel, mes yeux se laissent bercer par le paysage des rives et l’immensité de ces eaux limoneuses. La Gironde est un territoire grandiose, un des plus vastes parmi les estuaires macro-tidaux européens. C’est le lieu de rencontre des eaux de l’océan et des eaux douces de la Dordogne et de la Garonne, un lieu de transition. Ma main qui traine nonchalamment dans cette eau si peu transparente semble témoin de ces quatre à cinq millions de tonnes de matières en suspension qui s’accumulent dans cette zone naturelle. Je ne vois toujours pas mes doigts alors que nous avons dépassé la zone de turbidité maximale appelée «bouchon vaseux».

« Tu vois, l’estuaire de la Gironde n’est pas seulement le plus vaste d’Europe, c’est aussi un des plus grands axe naturel migratoire d’Europe ». Je souris en douce. Toujours ce côté chauvin l’ami Simon. « C’est une voie idéale pour les migrateurs, les oiseaux …. – Tiens ! regarde ! au dessus du marais, une cigogne blanche ! ». A peine repérée, l’animal disparait derrière les joncs. Grâce à la tranquillité de milieux diversifiés, marais, îles, vasards, falaises, plages de sables fins, collines, forêts, vignobles, les oiseaux migrateurs font halte dans l’estuaire et pour certains nichent aussi.

Là où nous voguons, à proximité de la rive droite, entre Blaye et Mortagne-sur-Gironde, Simon est à nouveau inspiré : «l’estuaire – dit-il - est bordé par une immense zone marécageuse de 15000 hectares et ce sur plus de 40 kilomètres. A Saint-Ciers, elle fait 8 kilomètres de large, tu te rends compte ? ». Mes connaissances m’ont aussi appris que le long de ces rives, les roselières abritent encore l’intimité de la loutre et du vison d’Europe, l’un des mammifères les plus menacés en France. Ces animaux fuient la présence humaine et préfèrent chasser de nuit. Donc, aucune chance que j’arrive à en voir un. Par contre, j’ai repéré une boule de poils qui glisse au fil de l’eau et traverse dare-dare un chenal. « Encore un ragondin !» s’insurge Simon. Hé oui, myocastor prolifère dans ces marais.

Autrefois, les anciens asséchaient les marais. Ils étaient considérés comme insalubres, donc drainés et endigués afin d’étendre les cultures et parfois y produire des vins recherchés comme ceux de l’île Verte. Plus récemment, vers les années 1980, l’urbanisation galopante a pris le relai. Heureusement, malgré les travaux d’aménagement, une part importante de ce patrimoine de zones humides subsiste aujourd’hui.

Les marais ont plusieurs fonctions écologiques. Outre la faune et la flore qu’ils abritent, ils jouent un rôle de filtre physique et biologique et améliorent la qualité de l’eau. Ces terres humides constituent aussi une formidable zone tampon entre les bassins versants des affluents et l'estuaire. Les eaux de la Gironde rentrent dans les marais lors des forts coefficients de marées. D’ailleurs, lors de la tempête de 1999, elles ont fait fi des digues et ont submergé ces terres de faible altitude parfois habitées… La brusque montée du niveau de la mer, semblable à un raz de marée, a ravagé les champs et les habitations, qui se sont retrouvées isolées par la crue.

Plus en amont, au niveau de Braud-et-Saint-Louis, l’inondation avait failli provoquer un accident majeur. Le centre de production nucléaire du Blayais implanté en bord de Gironde est situé, à vol d’oiseau, à 45 km de Bordeaux. Le 27 décembre 1999, les digues qui ceinturent et protègent le site cèdent par endroits. Des milliers de mètres cubes d’eau envahissent le lieu et une partie s’engouffre dans les galeries souterraines et noient des systèmes de sauvegarde. Le vent de son côté provoque la rupture des lignes à haute tension qui relient la centrale au réseau. Le courant ne peut plus être évacué. Les réacteurs sont arrêtés d’urgence. Heureusement, les pompes de secours ont fonctionné. Une seule pompe en panne et c’était la catastrophe. La tempête a eu lieu un jour de marée moyenne, mais en période de hautes eaux, le niveau de l’eau dans l’estuaire aurait été bien plus élevé. Personne ne peut exclure l’hypothèse d’une autre tempête, un jour de marée haute … Il fait chaud sur l’eau en ce mois de mai, pourtant un long frisson me parcourt le dos.

A Mortagne-sur-Gironde que je situe au loin, la tempête a créé de nombreuses brèches dans les digues du polder qui servait autrefois à la céréaliculture. Il a été acheté par le Conservatoire du littoral en 2000 et maintenu accessible aux pleines mers, comme c’est le cas pour le polder de l’Île Nouvelle acquis en 1991. L’objectif est d’augmenter l’efficacité et la pérennité des digues en les faisant précéder d’un pré salé, espace où la houle vient s’atténuer progressivement. Et pour recréer ces prés salés largement endigués ou érodés il s’agit désormais de dépoldériser … Francis Bacon n’a-t-il pas dit « La nature, pour être commandée, doit être obéie » ?

Ces anciens polders garantissent aujourd’hui des fonctions vitales de reproduction et de nourricerie pour les populations de poissons. A ce mot de « poisson » sorti de mes pensées, mon regard retourne automatiquement vers les eaux turbides de l’estuaire et sur Simon en train de remonter ses nasses. Il a raison de dire que la Gironde est un des plus grands axes migratoires européens puisqu’il abrite aussi l’ensemble des poissons migrateurs : esturgeon, anguille, saumon atlantique, truite de mer, lamproies marine et de rivière, alose feinte et grande alose. Des espèces qui vivent alternativement en eaux douce et salée. Cet estuaire, sous nos bottes, est pour elles un formidable lieu de passage, d’alimentation, de préparation physiologique et de croissance.

L’esturgeon, espèce reine en Gironde mais relique, est le poisson européen le plus menacé. Autrefois abondant dans la majorité des grands fleuves européens, il a disparu progressivement à partir de la fin du 19ème siècle. Aujourd’hui, il ne reste que quelques milliers d’individus, tous originaires du bassin versant Gironde-Garonne-Dordogne. La dernière reproduction date de 1994. Depuis 1982, le Sturio, comme disent les scientifiques, est protégé par la loi. Simon se rappelle « Mon père en a pêché des « Créacs » du côté de Blaye dans les années 50, et des gros à l’époque du caviar ! de belles femelles de 3 à 5 mètres ! moi, j’ai surtout connu l’époque où à la pêche on capturait les jeunes. » Depuis 1994, aucune reproduction naturelle n’a eu lieu en Garonne ou en Dordogne. « Quel gâchis » - reprend-il – « Mais l’estuaire nous semblait tellement inépuisable». Surpêche, oui, mais aussi barrages et pollution qui dégradent les habitats. Un trio infernal bien connu dans la disparition de la faune aquatique à l’échelle mondiale.

Je décide de remonter le moral de mon ami. « Tu le sais peut-être, il existe un plan de sauvegarde du Sturio en Europe et en France un plan de restauration a été lancé en 2007 ». Simon ne répond pas et semble faire la moue. Je continue imperturbable « et grâce au stock de géniteurs maintenus à la station de recherche de Saint-Seurin-sur-l'Isle, ça y est, les chercheurs ont mis au point les méthodes de reproduction artificielle à partir de géniteurs sauvages et issus de sauvages. L’Irstea va faire bientôt sa 6ème campagne de lâcher d'esturgeons juvéniles dans le milieu. Ils ont mis à l’eau des alevins de quelques jours, de neuf jours je crois, des dizaines de milliers entre 3 et 5 grammes … - tu entends ?». Bien sûr qu’il entend. « Ah oui ? les autres poissons doivent bien se régaler, dion ! ». Finement, car j’attendais sa pique, je glisse « Des poissons marqués avant le lâcher et qui ont grossi ont été re-capturés. C’est bien le signe de leur survie en milieu naturel dans de bonnes conditions, non ? ».

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Pour toute réponse, Simon relève sa dernière nasse avec dextérité malgré son âge. Il la bascule dans le bateau après avoir bloqué le câble de fond. La nasse ouverte, une anguille d’environ vingt centimètres en sort et vient rejoindre dans le fond du seau ses congénères à peine plus grosses. « Tu vois, il a pas bonne mine ton milieu naturel ! » - balance Simon - « cinq malheureuses anguilles pour six nasses, tu parles d’une pêche !». Je décide de le taquiner « Messire, ne serait-ce point l’homme qui ne sait plus pêcher !? » Simon se saisit d’un vieux pot de yahourt en plastique remonté des entrailles du lit de la Gironde avec une des nasses, il me vise l’air méchant et me loupe de peu en éclatant de rire.

Après cette passe d’armes, et puisque la Gironde est aussi un estuaire viticole, nous décidons de trinquer à sa santé. Simon a glissé sa main dans le panier pour en sortir deux verres et une bouteille de vin rouge de ses vignes, appellation Saint-Émilion. Certes ce n’est pas un grand cru, mais le vin est bon. Il est produit par un de ces derniers pêcheurs professionnel-viticulteur, encore nombreux dans les années 1960, eux aussi en voie de disparition désormais. Simon est décidé à me dispenser un peu de son savoir « Actuellement, ce vin c’est un assemblage de trois cépages : cabernet franc, cabernet sauvignon et merlot. Et comme tu le sais, le cépage cabernet sauvignon est très influencé par la chaleur ? … Hé-bien, avec le réchauffement climatique, d’ici quelques années, si mon fils continue la vigne, il pourra produire un vin seulement issu du cabernet sauvignon, comme en Californie ! … Hé oui, le climat sera plus important que le sol ». Je ne sais pas si cette perspective enchante réellement mon ami. Je ne m’y connais pas assez en vin, même si je l’apprécie. Je sais par contre que le mariage des saveurs entre le vin et les ressources halieutiques a su enrichir le patrimoine local girondin : lamproies à la bordelaise, matelote d’anguille, pibales fricassées au vin blanc … mon estomac gargouille – c’est l’heure de casser la croûte à présent. Nous mordons avec appétit dans le pain et nos morceaux de grenier médocain tout en reprenant notre conversation sur les poissons.

C’est vrai, la population d’anguille pêchée à tous ses stades de vie connait depuis ces dernières années des niveaux historiquement bas. Mais ce phénomène s’observe sur l’ensemble de sa vaste aire de répartition euro-méditerranéenne. Simon ajoute « Après la quasi-disparition de l’esturgeon et du saumon, l'abondance de l'anguille a elle aussi chuté. A elle seule cette espèce assurait plus de 60% de notre chiffre d’affaires. La grande alose ? chute spectaculaire du stock en Gironde et fermeture de sa pêche par moratoire en 2008 pour 5 ans … franchement, je plains les jeunes ! c’est la fin de la pêche artisanale … ». Comment le contredire, seul le niveau d’abondance des stocks de lamproie marine apparait aujourd’hui satisfaisant.

Je jette un œil sur les anguilles jaunes capturées. Elles semblent gaillardes et glissent avec vivacité entre mes doigts. Aucun ulcère, ni hémorragie. Extérieurement, rien à signaler d’anormal. En 2010, les anguilles n’étaient ni commercialisables ni consommables. Notre bassin se remarque par rapport aux autres sites français et européens. Les taux de polychlorobiphényles (ou pyralènes) dits PCB y sont supérieurs à la norme. Des interdictions par arrêtés préfectoraux sont tombées depuis 2009 sur différents secteurs. L’anguille, sauf son stade alevin, et l’alose feinte sont concernées par ces restrictions en 2010 et 2011, sur quasiment l’ensemble du système fluvio-estuarien dans le département de la Gironde.

Jusqu’à la fin du XXème siècle, la Gironde était considérée comme un des estuaires les moins pollués d’Europe car peu industrialisé. Depuis plusieurs années, des études récentes montrent une dégradation générale de sa qualité. Sur ce type de grand bassin, les impacts des différentes activités humaines se cumulent très souvent dans l'espace et dans le temps.

La pollution est chronique et diffuse. Elle est accentuée par le fonctionnement particulier de l’estuaire et le phénomène de bioaccumulation tout au long de la chaine alimentaire. Chronique également la pollution polymétallique (cadmium, zinc, cuivre, mercure) venant des résidus d’anciennes mines du bassin du Lot. Les poissons les plus contaminés sont ceux qui résident longtemps dans l'estuaire, plus de 3 ans (l’anguille, le mulet et le flet). Par le biais de processus complexes, le bouchon vaseux peut aussi avoir un impact sur le comportement de ces différents contaminants et amplifier leurs influences néfastes sur la santé des espèces aquatiques.

Nos regards se portent vers le chenal de navigation. Deux cargos se croisent au loin. Aucun n’est cet immense navire qui depuis 2004 sert de transporteur depuis Saint-Nazaire jusqu’à Pauillac à une partie du fuselage de l'Airbus A380. Le trafic maritime nécessite l’accessibilité de l’estuaire par un dragage régulier du chenal par le port de Bordeaux. Ce dernier surveille les impacts environnementaux du dragage car les sédiments les plus récents sont décapés, à-priori les moins contaminés, et les sédiments plus anciens, donc les plus contaminés, sont remis en contact avec le milieu aquatique.

La qualité de l’eau est aussi influencée par les rejets domestiques et industriels des grandes agglomérations en expansion. Le long de la Garonne, entre Toulouse et Bordeaux, il y a plus d'un million d'habitants. En période d'étiage, ce fleuve est particulièrement sollicité par les pompages pour l’irrigation des zones de cultures. Les derniers déficits en eau sévères ont été observés en 1986, 1989/90/91, 2003 et 2006. Or, en présence du fameux bouchon vaseux, le débit est l’un des facteurs clés des déficits en oxygène. Quand la concentration en oxygène dissous dans l’eau devient trop faible, elle peut entrainer des situations critiques pour la plupart des poissons. Sur fond de réchauffement global de la planète, cette pression humaine a aussi entrainé une élévation d'environ 2°C des eaux estuariennes depuis la fin des années 1970. Tout ceci va évidemment affecter la distribution des poissons et la richesse en espèces.

Autre impact, les herbicides. Ils ont une origine agricole mais aussi urbaine. Des suivis de pesticides ont été faits dans la Garonne et la Gironde. Les concentrations sont toujours faibles, sauf ponctuellement dans le temps, lors des périodes de traitement des cultures à la fin de printemps début de l’été. Les teneurs relativement faibles en hiver traduisent au moins l’effet de dilution et l’expulsion de ces molécules. Je glisse sournoisement ces quelques mots à Simon en finissant mon verre « Et ta vigne, tu la traites ? ». Esquivant ma question, Simon répond « J’ai lu dans Sud-Ouest que les concentrations en nitrate ont augmenté de 20 % environ en dix ans. ça vient de plus haut, des zones agricoles des affluents de la Dordogne et de la Garonne ».

Avant que je puisse répondre, il enchaine. « Et la centrale du Blayais qui pompe 168 mètres cube d’eau par seconde, elle a bien dégradé le milieu elle aussi, non !? … ». Sujet sensible depuis son entrée en fonction en 1981. Le centre de production nucléaire fait l’objet d’une surveillance assidue. Si l’impact thermique du rejet d’eau réchauffée semble négligeable, celui mécanique des tambours qui filtrent l’eau nécessaire au refroidissement est plus tangible. Il induit une mortalité variable selon la fragilité des espèces et leurs stades. Cent pour cent pour les gobies et les jeunes aloses. « J’ai bien lu que la destruction des crevettes avait été estimée entre 40 et 50 tonnes en 1985 ? Autant que la production de la pêche professionnelle de l’époque! » Simon vient de lancer le moteur. Malgré un peu de mauvaise foi, parfois, il fait partie de ces pêcheurs qui prennent le temps de lire les documents scientifiques et cherchent à s’informer.

Nous faisons route et le vent nous vivifie. Oui, depuis de nombreuses années, la dégradation de l’estuaire de la Gironde est dénoncée par les associations, notamment celle des pêcheurs, les scientifiques et les collectivités locales. Cette prise de conscience est arrivée à maturité. Depuis une dizaine d’années, l’estuaire concentre de nombreuses initiatives de protection, de concertation et d’entente. Le Syndicat Mixte pour le Développement Durable de l'Estuaire de la Gironde (SMIDDEST) a été créé en 2001 à l'initiative des départements de la Gironde et de la Charente-Maritime. En 2004, les Régions Aquitaine et Poitou-Charentes ont rejoint le Syndicat Mixte, suivies de la Communauté Urbaine de Bordeaux en 2010. Dès 2002, un schéma d'aménagement et de gestion des eaux, un « SAGE », a été engagé pour l'estuaire. Les enjeux sont d'améliorer l'environnement tout en préservant les activités humaines (activité touristique, production d’énergie, pêche, navigation commerciale, agriculture, sylviculture, urbanisme, …).

L’estuaire de la Gironde est fondamental pour les poissons migrateurs. A ce titre, il a été classé en 2006 comme zone de protection spéciale au sein de Natura 2000, réseau européen qui concilie préservation de la nature et préoccupations socio-économiques. Mais rien n’est simple. Ainsi, des dossiers d’extraction de granulats dans le lit mineur de l’estuaire et en mer sont régulièrement déposés. Il s’agit de menaces pour les habitats benthiques des jeunes esturgeons. Depuis une dizaine d’années, des suivis scientifiques ont pu commencer à localiser leurs zones de nourricerie dans le secteur aval de l’estuaire. Il reste à identifier les habitats essentiels utilisés par cette espèce depuis son arrivée vers l’âge de 8 mois jusqu’à son départ de l’estuaire autour de 7 ans. Des plans de conservation des esturgeons et de leurs habitats à des échelles spatiales larges sont donc nécessaires. Un parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et des pertuis charentais est également en projet depuis un arrêté ministériel de 2008.

Près du ponton où nous débarquons à port Maubert, je souris à Simon en lisant un texte sur le panneau du Conseil Général qui commence ainsi « Site naturel exceptionnel, l’estuaire de la Gironde est l’un des plus authentiques d’Europe. … ». C’est vrai : touchée mais loin d’être morte la Gironde !